Une recherche en sociologie, sur les diabètes et les vieillissements qui propose d’aller au-delà des a priori.
Déconstruisez certaines idées-reçues sur les diabètes avec la thèse réalisée par Marie Barroyer, doctorante au Diabète LAB de la Fédération.
À l’occasion de la Semaine Bleue, semaine nationale dédiée aux personnes âgées et aux personnes retraitées, Marie Barroyer vous propose de déconstruire quelques idées reçues sur les diabètes, à partir de son travail de thèse, dont vous avez déjà pu découvrir certains éléments dans un précédent article publié ici et sur le site du Diabète LAB.
Sa recherche porte sur le vieillissement avec un diabète, et plus précisément sur la manière dont le vieillissement transforme la maladie et son vécu. Pour illustrer certaines idées reçues, qui vous parleront sûrement, elle s’appuie sur des situations concrètes de personnes rencontrées au cours de son enquête de terrain.
« Le diabète c’est une maladie de vieux »
Il existe plusieurs types de diabète, dont deux principaux : le diabète de type 1 (DT1) et le diabète de type 2 (DT2), qui diffèrent notamment par leur âge d’apparition. Le diabète de type 1 est une maladie auto-immune, qui représente 6 % des cas de diabète et survient généralement chez les personnes jeunes (enfants, adolescents, jeunes adultes). Tandis que le diabète de type 2 est plus fréquemment associé à un âge avancé. Il est lié à une résistance progressive de l’organisme à l’insuline, pouvant être influencée par nos modes de vie. Il représente environ 92 % des cas de diabète1, par exemple, de récentes études révèlent que la prévalence du diabète de type 2 augmente de 2 % chaque année chez les 16-18 ans.
Ainsi, le diabète peut survenir à différents moments de la vie, et ne se réduit pas à une pathologie du grand âge. En réalité, ce qui différencie souvent les parcours, c’est le temps passé avec la maladie. L’âge avancé n’est donc pas toujours un marqueur d’apparition de la maladie, mais peut aussi être associé à un long vécu avec le diabète et aussi à un diagnostic tardif.
« Les personnes âgées ne savent pas utiliser les nouvelles technologies »
C’est une idée assez répandue dans nos sociétés, mais la réalité est bien plus complexe. L’usage des technologies, dont les technologies de gestion des diabètes (lecteur de glycémie, pompe à insuline, boucle fermée), varie en fonction de plusieurs facteurs, comme le milieu social, le genre, ou encore le contexte de vie dans lequel se trouvent les personnes.
Pour sa thèse, Marie a rencontré certains hommes âgés qui mobilisent les techniques et technologies liées à la gestion de leur diabète pour affirmer qu’ils ne sont pas « vieux », et qu’ils demeurent capables de gérer leur maladie. Elle s’est intéressée au cadre de vie des personnes âgées , notamment dans les Établissements d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD). Elle a rencontré plusieurs résidents, souvent des femmes, qui utilisent des lecteurs de glycémie pour surveiller leur glycémie et ajuster leur alimentation. Cette capacité à interpréter les données et à faire des choix constitue une forme d’autonomie. Ainsi, quand les auto-injections ne sont plus possibles, elles sont réalisées systématiquement par les infirmières.
Ces éléments contredisent l’idée que les personnes âgées seraient résistantes aux changements. L’apprentissage et l’appropriation est un processus qui varie d’une personne à l’autre. Malheureusement, les stéréotypes liés à l’âge demeurent très présents dans nos sociétés, et ils se retrouvent parfois dans les discours de certains professionnels de santé ou du secteur médico-social, mais aussi dans ceux des proches.
« Les personnes âgées sont dépendantes et ne peuvent pas gérer seules leur diabète »
Cette idée est parfois véhiculée dans les discours des professionnels ou des proches, qui pensent que les personnes âgées ne peuvent plus s’occuper de leur diabète seules, mais c’est une vision simpliste. En réalité, la gestion du diabète peut évoluer selon ce que les personnes maintiennent dans leur quotidien, dont le diabète fait partie. Certaines tâches liées à la gestion du diabète peuvent ainsi être déléguées lorsque la personne en ressent le besoin, sans perdre pour autant toute son autonomie. Même si une personne âgée rencontre des difficultés, par exemple physiques, elle peut continuer à rester actrice de sa santé, comme surveiller son alimentation, et garder des rôles sociaux, comme celui de père, de mère ou de grand-parent.
Parfois, certaines personnes choisissent de manière volontaire de déléguer certains actes. Une dame âgée vivant seule à son domicile a, par exemple, préféré qu’une infirmière fasse ses injections d’insuline, car cela lui permettait de garder du lien. Ainsi, déléguer ne signifie pas renoncer à son autonomie, mais peut en être une expression.
« L’activité physique c’est seulement pour les jeunes ! »
Dans les représentations sociales, l’activité physique reste souvent associée à la jeunesse. Loin d’être réservée aux plus jeunes, l’activité physique est un levier thérapeutique central dans le traitement des diabètes. Elle contribue directement à l’équilibre glycémique et peut prévenir certaines formes de perte d’autonomie. Bouger au quotidien, entretenir sa mobilité, monter des escaliers, jardiner, marcher régulièrement, sont des activités physiques. Dans certains cas, ces efforts sont facilités par un accompagnement et par une activité physique adaptée qu’il soit professionnel ou institutionnel.
Ces idées reçues montrent à quel point il est nécessaire de dépasser les représentations simplistes sur les personnes âgées atteintes de diabète. Le terrain révèle une réalité bien plus nuancée : des parcours variés, des manières différentes de vivre avec la maladie, entre maintien de l’autonomie et choix de délégation. Changer de regard sur le vieillissement, c’est mieux comprendre les besoins, les ressources et les stratégies d’adaptation des personnes concernées et ainsi penser une prise en charge plus attentive à chacune.
Sources :
- 1Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités. Diabète, 2023 (Consulté le : 22/07/25)
Crédit photo : ©Yakobchuk Olena