Aller au contenu principal

Boris Guimbard : « Je ne suis pas le seul DT1 à vouloir devenir gendarme ou policier.»

Métiers interdits et DT1 : le portrait de Boris Guimbard

Boris Guimbard a 41 ans. Technicien archiviste et administrateur-secouriste au sein de la protection civile, Boris est également atteint d’un diabète de type 1. En 2022, il tente de rejoindre les rangs de la gendarmerie, en vain. Puis ceux de la police nationale, en 2023. Retour sur un parcours semé d’embûches.

Boris Guimbard mène une lutte acharnée contre les métiers interdits. Et pour cause, après une courte expérience en 2004 en tant que gendarme adjoint volontaire (GAV), il tente en 2022 de réintégrer les rangs de la gendarmerie nationale. Mais, avec un diabète de type 1 en plus, Boris ne savait pas que cela ressemblerait au parcours du combattant.

« Je voulais porter l’uniforme »

Fin 2022, Boris rencontre un gendarme réserviste qui lui conseille fortement, vu son profil, de tenter de rejoindre les réserves opérationnelles de la gendarmerie. Secouriste au sein de la protection civile, ancien cavalier et ayant déjà côtoyé l’arme à feu, Boris a tout du candidat idéal pour rejoindre la gendarmerie. 
Sachant que le diabète de type 1 et le diabète de type 2 sont pointés du doigt pour rejoindre la gendarmerie, alors même que la loi stipule que l’évaluation doit être effectuée au cas par cas, Boris part en connaissance de cause. 
Il réussit les concours, tout en ayant un profil très intéressant. Les majors lui faisant passer les concours pour rejoindre la prépa de Gendarmerie Nationale, pour intégrer une école en avril 2023 lui disent : « Votre profil, malgré le diabète est défendable dans la mesure où vos compétences sont intéressantes. » 
Alors, confiant, et malgré des soucis de santé dont Boris a conscience : « J’ai également eu une tumeur bénigne à l’oreille, appelé cholestéatome, étant jeune, donc j’ai une perte d’audition liée à cela et aux multiples interventions chirurgicales. », Boris se rend à la visite médicale de la gendarmerie nationale le 2 mars 2023.

La désillusion de l’inaptitude médicale

Lors de cette visite médicale, le médecin ne voit aucune contre-indication liée à la vue, l’audition ou le diabète de type 1. Mais le médecin déclare : « Au vu de la loi, je suis obligé d’appliquer le SIGYCOP », un référentiel d’aptitude archaïque et excluant, faisant figurer les diabètes sur une liste de pathologies contre-indiquées avec l’aptitude médicale pour certains métiers, encore en vigueur en 2022.

1er recours contre la gendarmerie nationale

Après avoir été déclaré inapte, Boris intente un recours contre la gendarmerie. La réponse de la gendarmerie est quasi immédiate : c’est arrêté, la gendarmerie n’accepte pas les personnes atteintes de diabète dans ses rangs, et ne les acceptera jamais.  

Tenter de rejoindre la police nationale

En avril 2023, Boris apprend que la police nationale a ouvert ses portes depuis 2 ans. Les personnes atteintes de diabète peuvent se soumettre à la visite médicale, pour tenter de rejoindre les rangs.
Boris s’inscrit et passe un entretien devant un jury de 4 personnes en octobre 2023. Animé par l’envie profonde de porter l’uniforme, Boris s’engage avec la même volonté qu’à la gendarmerie. Il convainc le jury et se soumet à la visite médicale de la police nationale le 5 octobre 2023, en prenant cette fois ci toutes les précautions : « J’ai pris tous mes dossiers médicaux, toutes mes analyses, mes hémoglobines glyquées, l’ensemble de mes radios depuis ma naissance, pour garantir la meilleure transparence. »
Comme pour la gendarmerie, la vue, ni l’audition ne posent de problème. L’infirmière accueillant Boris constate son POD sur le bras et lui dit : « Vous êtes diabétique de type 1 ? ». Boris approuve, lui fait constater une hémoglobine glyquée n’ayant jamais dépassé 7,4 % en 12 ans de diabète. L’infirmière déclare : « Il est bien stabilisé, il n’y aura aucun souci ».

« Le médecin voit mon Omnipod et me dit : « inutile de vous déshabiller » » : inaptitude de la police nationale.

Une nouvelle fois, Boris fait face à l’inaptitude médicale et à la cruauté du médecin : « Je ne vois pas pourquoi vous êtes là, on ne prend pas les diabétiques ». Boris tente de se défendre : « Le SYGICOP a évolué, les réserves de la police nationale sont ouvertes aux personnes atteintes de diabète ». Le médecin lui fait signer un avis d’inaptitude et demande à Boris de repartir.

1er recours contre la police nationale

Dans le mois qui suit, Boris fait un recours contre la police nationale. C’est à ce moment qu’il se rapproche de la Fédération et notamment de Jeanne, juriste et responsable du service Diabète et Droits de la Fédération. Le 16 novembre 2023, Boris reçoit une réponse, son inaptitude définitive est confirmée.

« Je ne suis pas le seul diabétique à vouloir devenir gendarme ou policier » : un combat individuel qui prend une dimension collective

Au fil des refus et des recours, Boris découvre que son cas n’est pas isolé. Il tombe sur le parcours de Lilian, superviseur au SAMU et référent cellule de crise dans l’unité fonctionnelle « médecine de catastrophe », et atteint d'un diabète de type 1. Malgré ses compétences, il a été recalé pour intégrer la police nationale. Boris comprend alors que son combat peut avoir une portée bien plus large et que tous ses recours ne sont pas vains : « En lisant son témoignage, je me suis mis à pleurer. Je me suis dit : je ne suis pas le seul diabétique à vouloir m’engager au sein de la police ou de la gendarmerie », raconte-t-il. 
Ce déclic marque un tournant dans le combat mené par Boris. Il contacte Lilian, qui de son côté avait déjà amorcé des échanges avec les institutions, puis décident ensemble de porter plus loin leur cause commune. Ils alertent, écrivent à 377 députés, interpellent les institutions et refusent de laisser l’injustice gagner du terrain. 
Plusieurs parlementaires répondent, tels que Ségolène Amiot, députée de la 3e circonscription de Loire-Atlantique en 2022 ou encore Véronique Besse, ancienne députée de la 4e circonscription de Vendée. Ces députées s’engagent, posent des questions officielles aux ministères concernés. Les échanges évoluent mais la situation de Boris et Lilian ne change pas vraiment. « Quand les députés s’y intéressent, les ministères sont obligés de répondre. » explique Boris. Pourtant sur le terrain, la réalité reste la même, avec une méconnaissance du diabète de type 1 et des nouvelles modalités d’administration de traitement.

Une justice qui tranche en faveur des personnes atteintes de diabète de type 1

Après un long recours contre la police nationale, Boris l’emporte : le tribunal reconnaît que son diabète, parfaitement équilibré depuis plus de 10 ans, ne peut pas constituer à lui seul un motif d’inaptitude. Le juge ordonne une nouvelle visite médicale. Malgré ce jugement clair, la nouvelle visite médicale conclut à une nouvelle inaptitude. Des motifs supplémentaires d’inaptitude apparaissent, concernant son audition et sa vision, alors même que des contre-examens réalisés ensuite par des professionnels ne révèlent aucune anomalie. « J’ai demandé une copie de mon dossier médical pour comprendre. On me l’a refusée. Là, j’ai compris qu’on ne voulait pas de nous. Pas de diabétiques. Peu importe notre réalité médicale, peu importe les avancées technologiques en matière de traitements. »

Entre temps, le 23 septembre 2025, la gendarmerie nationale rappelle Boris pour une nouvelle visite médicale. Boris, plein d’espoir, s’y rend, mais le médecin fait preuve de cruauté, en lui donnant une fiche de poste, avec toutes les missions auxquelles Boris peut prétendre. Le médecin énumère chaque mission et déclare : « Vous êtes diabétique : le sport vous ne pouvez pas, les vacations de 8 h statique vous ne pouvez pas, le travail de nuit vous ne pouvez pas, le port de charges vous ne pouvez pas… ». Missions qu’exerce pourtant Boris au sein de la Protection Civile. Cette fois, Boris, épuisé, n’engagera pas d’énième recours.

« Aujourd’hui ce combat n’est plus le mien, il est pour les autres »

Boris ne nourrit plus d’illusions quant à son propre avenir au sein de la police ou de la gendarmerie. Mais impossible de renoncer pour cet homme rempli de niaque. Sa motivation est ailleurs, dans l’idée que le combat pourra permettre à plus de jeunes atteints de diabète, stabilisés et compétents de ne pas vivre les mêmes blocages injustifiés. « Si je peux donner un espoir à quelqu’un, c’est gagné. Si un jeune comme Lilian peut intégrer un métier qui le fait rêver, alors tout ce que j’ai fait aura servi ». 

« Ne vous laissez pas marcher dessus »

Fatigué par les démarches mais toujours animé par le sens de la justice Boris délivre un message fort de résistance : « On n’a rien demandé. Le diabète on ne l’a pas choisi. Mais on a le droit de vivre notre vie pleinement. Alors battez-vous. Ne laissez personne décider à votre place de ce dont vous êtes capables. » Et aujourd’hui une question lui reste en tête : « Pourquoi la police nationale se sent supérieure à un tribunal administratif ? ».

La Fédération continue d’œuvrer sans relâche pour démanteler les obstacles qui ferment l’accès à certains métiers aux personnes atteintes de diabète. Depuis 1997, c’est grâce à son service Diabète et Droits que la Fédération accompagne et conseille les personnes atteintes de diabète sur les problématiques qu’elles rencontrent en lien avec l’emploi. Pour en savoir plus sur ce combat historique, cliquez ici : Métiers interdits : un combat au cœur de la mission de défense de la Fédération.

Si vous avez des questions sur vos droits ou que vous souhaitez être accompagné dans vos démarches, Jeanne, notre juriste, est à votre écoute au service Diabète et Droits, par mail à l’adresse juriste@federationdesdiabetiques.org ou par téléphone le mardi de 8 h à 12h30 et le jeudi de 13h30 à 18 h au 01 40 09 24 25.
Découvrez le guide Diabète et Travail en le téléchargeant gratuitement sur votre espace personnel.

Vous souhaitez vous rapprocher d’une association locale ou devenir bénévole, consultez notre page dédiée : 
https://www.federationdesdiabetiques.org/je-rejoins-mon-asso-locale