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Témoignage

Marie, 27 ans

Le diabète : 7 lettres qui enveloppent bien des idées reçues. Parle-t-on du 1, du 2 ? J’ai pioché le numéro 1 à l’aube de mes 10 ans. Si je me fichais pas mal des confusions jusqu’ici, 18 ans après, elles commencent légèrement à me peser. Peser est le bon mot, sachant que dans la conscience collective moderne le diabète est allègrement associé à l’obésité. « T’as mangé trop de bonbons quand t’étais petite toi ! ». « Ah oui, t’as plein de sucre dans le corps ». Et puis, piqûres, pompe, cachets, même combat. « Ma grand-mère aussi a ça, la pauvre elle doit prendre des cachets tous les jours ». Moui, la pauvre. Et l’habitude, j’oubliais l’habitude : « ça va, t’as appris à vivre avec depuis le temps ». Il valait mieux oui. Ce que j’aimerais et n’ose répondre à ces gens savants serait : non, ma maman n’a pas mixé du bacon dans mes biberons quand j’étais bébé. Non, je n’ai pas un compte fidélité au fast food. Non, aucun cachet ne peut remplacer les injections. Non, je n’ai jamais été forte au yoyo, pourtant j’y joue tous les jours. Non je ne passe pas ma vie allongée, j’ai juste un pancréas qui ne marche pas. Et oui j’ai appris à vivre avec, sauf que jamais il n’y aura de bouton pause, ou une seule journée sans y penser. Qu’une seule pause peut vite finir en 14 jours d’hospitalisation. Entre Noël et nouvel an pour la dernière.

Forcément, tout ça ne s’apprend pas à l’école. Même nous, nous n’apprenons pas tout à l’hôpital. Je ne peux donc pas leur en vouloir. Simplement, je voudrais qu’ils se passent de commentaires s’ils ne savent pas ou qu’ils posent des questions plutôt qu’avancer des affirmations dénuées de vérité. J’aimerais presque avoir une notice sur moi, à dérouler chaque fois que l’on découvre que je suis malade ou chaque fois que je suis de mauvaise humeur, faute d’une glycémie parfaite. D’ailleurs, j’en profite pour adresser mes excuses à tous ceux autour de moi pour tous ces nuages noirs qui sont passés et passeront encore sans crier gare.

Dans un monde idéal, j’aimerais avoir un peu moins de gras sur le ventre pour ne pas faire face à ce genre de confusion. Seulement à force de piquer depuis 18 ans sur cette surface, j’en ai des boules sous la peau. Mais ça, qui peut le savoir sinon moi ? Comme personne ne sait que j’évite pourtant tout dessert, que je mange des portions raisonnables et des plats les plus équilibrés possible. J’aimerais qu’ils comprennent qu’une maladie invisible est d’autant plus complexe de l’intérieur, que ce n’est pas parce que ça ne se voit pas que ce n’est pas contraignant. Bien au contraire. Que l’on arrête de me dire de vivre normalement si c’est pour me juger dès que j’allume une cigarette ou que je trinque en disant « santé ». Faire de son mieux ne veut pas dire être une machine.

J’aimerais que l'on rectifie tous les chiffres qui ne cessent de grossir sur cette « pandémie » du 21ème siècle, dans lesquels on y glisse deux types de maladies complètement différentes, qui ont pour seul point commun leur intitulé, que l’on arrête de tirer ce portrait-robot de gens énormes qui respirent comme Dark Vador quand on parle d’un diabétique, que l’on cesse de croire que nous sommes des sucettes sur pieds alors que nous risquons l’hypoglycémie au moindre effort. Secrètement, j’aimerais même que l’on rit de ma pompe en la comparant à un tamagotchi plutôt que de la regarder avec pitié. Enfin, j’aimerais que l’on sache que je n’ai pas honte de mon diabète. J’ai juste honte du regard biaisé que l’on pose sur lui. Mon diabète je l’aime plus que je ne le hais car s’il n’est qu’emmerdes, il est aussi toute ma vie.

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