Aller au contenu principal

L’autoreprésentation peut-elle faire vivre la démocratie sanitaire ?

« L’enfer est pavé de bonnes intentions », dit-on. La Haute Autorité de Santé (HAS) vient de publier une recommandation qui met à mal tout un édifice de représentation de la démocratie sanitaire construit patiemment depuis plus de vingt années au gré des crises sanitaires (affaire du sang contaminé, hormone de croissance, vache folle puis Médiator) et de nombreuses Lois (en 2002, 2009, 2016 et même 2019).

Jusqu’à présent comme le rappelle France Assos Santé dans son communiqué de presse, les choses paraissaient assez claires :

-    Les programmes d’enseignement de l’éducation thérapeutique étaient dévolus soit à des associations de patients comme le font de longue date la Fédération Française des Diabétiques, l’Association Française des hémophiles, la Ligue Contre le Cancer ou bien encore l’Association François Aupetit, pour n’en citer que quelques-unes, soit à des programmes universitaires dans le cadre de diplômes universitaires.

-    Les programmes de formation à la démocratie sanitaire reviennent à France Assos Santé et quelques grandes autres associations d’usagers. Cette formation est indispensable pour tenir sa place et son rôle en toute compétence dans les instances de la démocratie sanitaire, CNSA, CRSA, CDU, CNS, etc.

La loi est aussi « limpide » comme l’indique France Assos Santé dans son communiqué de presse : « seules les associations agréées représentent les usagers du système de santé dans les instances hospitalières ou de santé publique » (L 1114-1 du code de la santé publique).

Malheureusement, force est de constater que trop souvent sont désignées de manière unilatérale par l’autorité en place des personnes physiques (patients ou proches de patients par exemple) qui se sont autoqualifiées elles-mêmes et qui, de ce fait, ne sont représentatives d’aucun collectif de patients ni des usagers du système de santé.

Avec cette recommandation, la HAS va encore plus loin, puisqu’elle reconnait la possibilité à des personnes qui se sentent concernées de s’auto investir de ce droit de représentation, en dehors de tout circuit de formation, de désignation et de représentativité.
Le bouchon est poussé encore plus loin par la reconnaissance de l’e-patient (sic) : il suffirait donc d’avoir un blog, un compte Facebook ou Twitter pour s’estimer « influenceur » et donc représentatif d’un collectif de patients ou d’usagers. A quand des e-députés désignés sur leur nombre de followers ?

La représentativité des personnes concernées : c’est un droit et un devoir qui se mérite sur la base d’un engagement collectif, car c’est la parole collective des patients et des usagers concernés qui doit être portée et non pas la parole individuelle d’un seul ou d’une seule.

Le Collège de la HAS doit revoir au plus vite cette recommandation qui, par ailleurs, précise beaucoup d’autres  éléments intéressants. Cette recommandation ouvre très maladroitement la porte à un militantisme ou un corporatisme nuisible tandis que la HAS parallèlement prétend elle-même les combattre dans le même texte. Cette recommandation semble bafouer l’engagement humanisme de dizaines de milliers de bénévoles altruistes qui accompagnent au quotidien les personnes vulnérables au profit de quelques personnes autodécrétées.

La démocratie en santé vivement mise à mal par la Haute Autorité de Santé